La dégradation de l’environnement s’accélère à mesure que la population humaine s’accroît, et les efforts actuels n’infléchissent pas la tendance des indicateurs, au contraire. Intuitivement, on peut considérer que réduire la taille de la population humaine, en réduisant la fertilité, est l’une des choses les plus urgentes à faire pour assurer notre avenir sur cette planète. C’est déjà en partie le cas dans les pays développés, qui disposent de moyens de contraception, ou de manière plus drastique en Chine, avec la loi un seul enfant. Cependant, la plupart des populations dans les pays en voie de développement n’ont pas accès aux moyens de contraception qui limiteraient les naissances non voulues, et les efforts en ce sens sont freinés, notamment par  des considérations religieuses.

Il en va pourtant de l’avenir de l’humanité : nous sommes actuellement plus de sept milliards sur la Terre, et en 2100 nous serons entre 9.6 et 12.3 milliards (par comparaison, nous étions 1.6 milliards en 1900). Objectivement, la réduction de la taille de la population peut donc apparaître comme l’objectif n°1 pour limiter la destruction de l’environnement. Est-ce correct ? Est-ce faisable ?

Ce sont les questions auxquels deux écologues (Corey Bradshaw et Barry Brook) ont tenté de répondre en simulant l’évolution de la population en testant différents scénarios : réduction de la fertilité jusqu’à deux enfants par femme pour 2100, jusqu’à un enfant par femme pour 2100, ou carrément en 2045, suppression de toutes les naissances non voulues (~16% des naissances), pandémies, guerre mondiale aux pertes proportionnellement identiques à la seconde guerre mondiale.

Leurs prédictions indiquent qu’étant donné l’élan actuel qu’a la démographie humaine, il est impossible de limiter significativement la taille de la population d’ici à 2100 d’après les scénarios « réalistes » (estimations > 9 milliards). Les scénarios moins réalistes ou catastrophiques ne sont pas des solutions miracles non plus. La politique d’un enfant par famille en 2100 aboutirait à 7 milliards d’êtres humains sur la terre en 2100 (soit autant qu’aujourd’hui). Même des scénarios catastrophes type seconde guerre mondiale aboutirait à 10 milliards d’humains en 2100, ou un évènement de mortalité de masse type pandémie emportant 2 milliards d’humains en 5 ans aboutirait à > 8 milliards d’humains. Supprimer toutes les naissances non voulues aboutirait à >7 milliards en 2100.

 

Le débat consommation vs. démographie. Savoir que la démographie ne peut être facilement limitée nous oblige à réduire notre consommation. Merci à Sarah pour l'illustration.
Le débat consommation vs. démographie. Savoir que la démographie sera difficilement limitée nous oblige à réduire notre consommation. Merci à Sarah pour l’illustration.

 

Ces résultats montrent simplement que la réduction de la taille seule n’est pas une solution miracle. Attention, ils n’indiquent pas qu’il ne faut pas progressivement réduire la fertilité de la population humaine : une réduction est faisable est aboutirait à des centaines de millions de bouches en moins à nourrir pour 2100 ; et à mon avis des centaines de millions souffrant moins des conséquences de leurs générations précédentes.

J’ai le sentiment d’être face à une situation pire encore que le postulat de Khazzoom-Brookes. Ce postulat précise en résumé qu’une meilleure efficacité énergétique aboutit globalement à accroître la consommation énergétique. Une métaphore simple : les ampoules consomment moins ? Mettons des ampoules partout !

Pour contrer ce postulat, il faudrait empêcher d’augmenter le nombre d’ampoules, tout en réduisant leur consommation d’énergie. Si on ne peut pas empêcher d’augmenter le nombre d’ampoules, dans ce cas on doit réduire leur consommation d’énergie au minimum possible.

 

 

 

Pour l’espèce humaine, c’est exactement cette dernière situation. On sait désormais qu’il sera très difficile de limiter la démographie d’ici à 2100 ; donc il nous incombe à tous de réduire drastiquement notre consommation de ressources pour assurer la survie de notre espèce.